Cette
peinfiture est en quelque sorte une oeuvre artistique hybride... A la fois peinture,
sculpture et oeuvre culinaire, elle a été réalisée sur un support canson par
un travail d'étalement aux doigts, et surtout... en utilisant la matière première
même qui lui donne son sens artistique, c'est à dire de la confiture.
Grâce
à cette technique, on peut alors dépasser les limites imposées par la peinture
classique, en modelant une création sur de toutes nouvelles dimensions. En effet,
on s'étale ainsi non seulement sur les deux sens que la peinture et la sculpture
peuvent envelopper habituellement, c'est-à-dire la vue, et la matière en relief
qui peut donc être apparentée au toucher (voire le rejoindre complètement si
la nature de la sculpture permet un contact tactil direct), mais aussi sur le goût
et l'odorat. La confiture, aliment bien connu, peut ici révéler toutes ses qualités:
les efluves qu'elle dégage, les souvenirs gustatifs qu'elle fait remonter, et
peut-être même la perception réelle du goût si le spectateur s'enhardit à y poser
ses papilles gustatives.
Il
n'est sans doute pas utile de souligner que le toucher a ici une part importante
dans l'appréhension de l'oeuvre, de par la sensation étonnante que le spectateur
peut éprouver en effleurant cette texture à la fois inquiétante et amusante.
On pourrait même oser tenir compte (pourquoi pas?) du son "gluant et collant" ainsi
provoqué comme dimension auditive atteinte par l'oeuvre, au même titre que
les cinq autres sens.
Il
est important aussi de noter que la peinfiture apporte un intérêt artistique
par son évolution dans la temps, due à sa nature gélatineuse soumise lentement
mais sûrement aux forces de l'attraction terrestre, à la porosité du support
"papier canson" face à la confiture, ainsi qu'à sa décomposition par l'effet
des organismes vivants qui l'habitent (c-a-d les moisissures).
Détails
techniques.
Trois
types de confitures:
- Pensées
sauvages
- Mûres
- Rhubarbe
Chacune
a moisi dans son pot pendant plusieurs mois, développant ainsi son propre
type de moisissure (soit trois au total). La peinfiture a donc intégré ces trois
types de moisissures et continue à les cultiver au fil du temps.
La
peinfiture a été conçue début Janvier 2003.
Mais
assez parlé... Je vous laisse admirer...
Fixée sur mon mur, vue de loin...
Un peu plus près...
Encore plus près...
Toujours plus près...
Encore toujours plus près...
Toujours encore toujours plus près...
Très près, mais avec une effet de perspective psychédélique par la droite...
Puis par la gauche...
Un gros plan sur le coin gauche-haut. On discerne vaguement deux beau morceaux de moisissure grisonnante à l'extrême gauche et sur la droite, au centre de la grosse tâche de confiture de mûres. L'odeur de la confiture de mûres avariée est particulièrement répugnante. La confiture de pensées sauvages est orange clair (et comporte de la moisissure en traits grisés sombres presque invisibles). Celle de rhubarbe est jaune opaque, mais se mêle complètement à la précédente et devient impossible à distinguer.
Bord gauche. Un gros plan sur le premier des deux morceaux de moisissure précédemment cités.
En bas à gauche. Deux nouvelles tâches bien visibles de moisissure de confiture de mûres.
Bord haut, au centre. Une petite tâche de moisissure de confiture de mûres, et un trait de moisissure de confiture de pensées sauvage, dans le coin en bas à droite de la photo. Notez qu'ici la confiture est plus informément étalée que sur le bord gauche, soulignant par là un sens profond et caché à propos de quelque chose d'incroyablement très précis.
Le coin droit en bas. Ca fait penser à plein de trucs. Surtout à des trucs qui ont un coin en bas à droite.
Et pour finir, un gros plan sur le centre-bas. Très confitureux. Avec un brin d'imagination, on peut y voir un sexe de femme, un sexe d'homme, une silhouette maternelle, un visage austère, un bébé mort, un chien touffu, une vache, un hélicoptère, une moule, un rateau, un canari mutant et un gros tas de merde.
Hé
bien, vous avez maintenant vu à peu près tout ce qu'il y avait à voir. Il vous
manque évidemment les quatre autres sens, qui ne pourront être assouvis qu'en
venant apprécier cette oeuvre par vous-même sur mon mur. La visite coûte dix
euros par personne, et dure un quart d'heure (ouvert uniquement le dimanche
de 14h à 18h, renseignements disponibles par mail).
Si
cela ne vous suffit pas et que vous envisagez d'en faire l'acquisition, sachez
que sa valeur a été estimée par les experts à pas moins de beaucoup beaucoup d'euros .
Si vous ne possédez pas une telle somme, il est inutile d'y penser...
